L’appui scolaire des gosses de riches vaut-il plus que les fins de mois des pauvres ?!
Jeudi 9 novembre 2006 s’est tenue, dans la salle des chevaliers du Château de Neuchâtel, une présentation par le collectif des travailleurs sociaux neuchâtelois des situations souvent dramatiques que vivent certains démunis consécutivement aux mesures prises par le gouvernement cantonal, avec l’appui d’une majorité de députés.
Le lendemain, dans L’Express, l’événement était relégué en deuxième page, dans un article qui, s’il est bien écrit, reste de dimension modeste et qui est, de surcroît, placé discrètement – et symboliquement – en bas de page.
Ce traitement de l’information interpelle d’autant plus qu’en première page, on trouve un éditorial annonçant à la population qu’une entreprise vaudoise proposerait désormais des cours d’appui aux élèves neuchâtelois qui en auraient besoin. L’intéressant éditorial consacré à cette nouvelle de première importance insiste sur les risques d’apparition de système éducatif à deux vitesses. Quel privilège pour les lecteurs neuchâtelois qu’on leur présente une nouvelle fois ce débat audacieux, moderne et original sur la relation entre le pouvoir d’achat des parents et les chances de réussite de leurs rejetons !
La mise en place dans le canton de Neuchâtel, d’un système social à deux vitesses ne semble pas mériter, quant à elle, de commentaires, du moins dans la presse locale. Doit-on compter sur Le Matin, ou sur Le Temps pour que la problématique fasse l’objet d’un traitement journalistique digne de ce nom ?! Serait-on en train d’essayer de noyer le poisson, de distraire la population avec des banalités qui n’intéressent personne, histoire de détourner l’attention en maintenant le public dans une relative ignorance ?!
Le traitement insipide de la question par la presse locale donne raison à l’orateur invité par le collectif des travailleur sociaux, le professeur et Conseiller national Stéphane Rossini, pour lequel la politique sociale se réduit trop souvent à des considérations comptables qui font fi des difficultés auxquelles sont confrontées des personnes. Sommes-nous des chiffres ou des individus, telle est la question… Une quinzaine de courageux députés – de toutes les tendances politiques – ont répondu à l’appel du collectif et semblent présenter quelques honorables problèmes de conscience, estimant que les dispositions qu’ils ont prises ont peut-être été excessives, voire prises dans la précipitation… Est-ce à dire que tous les député(e)s absents sont réticents, voire réfractaires, à considérer que, dès lors que les dispositions qu’ils prennent portent à conséquence, leur responsabilité est engagée ? Probablement que non. D’un autre côté, ils semblent malheureusement donner raison à Monsieur Rossini lorsqu’ils votent des mesures de redressement économique sans se préoccuper de leurs effets sur les individus les plus démunis. Force est de constater, au demeurant, que les élus se gardent bien de mettre en place des indicateurs qui permettent de mesurer les conséquences de leur activité politique. C’est tellement plus facile de dire que c’est la faute des autres partis…
Quant à la presse locale, on ne peut que lui suggérer de prendre le risque de pratiquer un journalisme d’investigation qui se penche avec un regard plus critique et moins indulgent sur le système social à deux vitesses, sur le système économique à deux vitesses, sur le système sanitaire à deux vitesses, ou encore sur le système médico-social à deux vitesses qui sont en train d’être mis en place au motif qu’il faut assainir, sur le dos de la population, des finances publiques dans un état calamiteux.
Au passage, le journaliste courageux pourrait rappeler aux élus que la situation catastrophique des finances cantonales provient des dispositions que ces député(e)s ont prises dans le passé, et que la situation future résultera des mesures qu’ils voteront en décembre. Politique sans conscience se fait toujours au détriment de la population.
Et dans le domaine de la santé – du moment que ce site est consacré à cette problématique – le même journaliste pourrait aussi enquêter sur l’absence quasi totale de réformes du fonctionnement du service de la santé publique, et sur l’absence, de la part des député(e)s d’une analyse critique des conséquences financières des mesures prises par l’administration.
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